Que retenez-vous des fiches individuelles remplies par les candidats ?

« Ce que nous attendons, ce sont des renseignements sur leur parcours : leur formation et le type de stages effectués pour les étudiants, leurs expériences professionnelles pour les candidats en reconversion. S’il y a une “pause” dans un CV, le jury cherche à savoir ce que le candidat a fait durant cette période, comment il s’en est emparé.

Les candidats doivent par ailleurs mettre en exergue les compétences qu’ils estiment avoir pour le métier de magistrat et exposer leurs motivations pour exercer ce métier. Les réponses sont parfois assez convenues alors que nous cherchons à bien cerner et comprendre leur personnalité ainsi que la sincérité de leurs réponses.

Ce qui peut vraiment être utile pour le jury, en particulier dans le cadre des concours réservés aux professionnels en reconversion, c’est la manière dont ils parlent des expériences qu’ils ont pu acquérir pendant leur parcours, leur réflexion sur le fonctionnement de l’institution judiciaire.

Les candidats, en particulier les étudiants, peuvent aussi être tentés de se démarquer en énumérant leurs centres d’intérêt. Ils ont souvent tendance à en citer beaucoup : j’attire leur attention sur le fait qu’ils s’exposent à des questions du jury sur ces centres d’intérêt et doivent savoir bien en parler le cas échéant. »

Pouvez-vous nous citer des exemples de questions de culture générale ou d’actualité ?

« C’est vraiment très varié, ce qui tient au fait que les membres du jury sont issus d’horizons très différents et que tous proposent des sujets. Il peut y avoir des questions plus académiques que d’autres, des questions socio-judiciaires, d’autres plus tournées vers les institutions européennes et les traités européens…

En voici quelques exemples donnés l’an dernier :

Schengen
Le travail le samedi et le dimanche
La diversité est-elle une valeur ?
La laïcité, pourquoi le retour de la controverse ?
L’héritage de Napoléon
Aux racines du mouvement des Gilets jaunes. »

Il faut bien sûr avoir lu régulièrement, très en amont de l’épreuve, des revues ou journaux, et garder un esprit ouvert sur l’actualité. »

Les candidats peuvent-ils toujours tirer au sort deux sujets et choisir celui auquel ils souhaitent répondre ?

« Oui, ils tirent au sort deux sujets et en choisissent un. Quand ils tombent sur deux sujets difficiles, nous en tenons compte au moment de noter l’exposé. Un candidat qui aurait un sujet très facile de culture générale judiciaire et qui ferait un exposé médiocre sera plus sévèrement noté qu’un autre qui tomberait sur un sujet pointu et qui essaierait tout de même d’exposer quelques idées personnelles. »

Est-ce rédhibitoire de ne pas répondre à la question de culture générale ou d’actualité ?

« Il vaut mieux être prudent en disant qu’on n’est pas sûr de ce qu’on avance, que ce n’est pas un sujet qu’on maîtrise bien, mais exposer la manière dont on peut essayer d’interpréter le sujet. C’est plutôt bien vu, le jury ayant conscience que les candidats ne peuvent pas tout maîtriser.

Ce qu’il faut savoir, c’est qu’après l’exposé le jury se réserve toujours un temps (5 minutes environ) pour que le membre du jury à l’initiative du sujet pose à son tour quelques questions pour donner des pistes au candidat et lui permettre de se rattraper. »

Qu’attend le jury de la discussion sur le parcours et la motivation ?

« Le jury attend de voir comment les candidats conçoivent le métier de magistrat, le rôle respectif du juge et du parquetier, et s’ils ont réfléchi aux problématiques qui se posent à eux. L’objectif étant évidemment de recueillir des réponses les plus sincères possibles.

Nous nous réservons par ailleurs le droit de poser des questions plus générales sur leur connaissance de l’institution judiciaire. Je conseillerais donc aux candidats de s’imprégner des principes généraux du statut, de la procédure, des textes constitutionnels fondamentaux, de pouvoir parler de la Constitution, du rôle du Conseil constitutionnel, des textes européens, du Conseil supérieur de la magistrature... Il n’est pas demandé de tout connaître du droit et de la procédure quand on prépare le concours de la magistrature, mais nous voyons très vite quels candidats maîtrisent les principes juridiques fondamentaux leur permettant de trouver les réponses aux questions qu’ils auront à trancher quand ils seront magistrats.

Pour les professionnels en reconversion, nous essayons d’évaluer en quoi leur parcours peut être utile à la magistrature, mais nous cherchons aussi à savoir s’ils ont une connaissance suffisante de l’institution. Nous leur posons cependant des questions un peu moins techniques et “pointues” qu’aux candidats du 1^er concours car nous avons conscience qu’ils n’ont pas tous un parcours juridique et que leur formation est souvent plus lointaine.

Il n’y a pas de méthode absolue pour réussir l’entretien individuel avec le jury, mais il est important de se préparer à répondre sur les grands sujets qui sont au cœur de l’actualité judiciaire. »

Lire aussi

Concours de l’ENM : la mise en situation collective vue par le jury

Concours de l’ENM : conseils du jury pour réussir son grand oral